La toile intitulée Halbzeit de Michel Majerus est une peinture gestuelle qui semble avoir été rapidement brossée. La couche violette, griffée nerveusement dans la couleur encore fraîche, recouvre et efface une composition antérieure. Deux inscriptions et un logo viennent parachever cette œuvre qui semble prête à être « consommée » aussi vite qu’elle a été produite. L’effet recherché est immédiat, viscéral, comme dans le slogan Thirst–juice, Désir–produit, c’est le rythme qui lie consommateur et publicité: ce minimum de temps nécessaire à court-circuiter la réflexion. En calquant son travail sur la cadence folle d’un monde qui produit et diffuse des signes en temps réel, Majerus nous donne précisément matière à réflexion sur ce temps. Avec une énergie physique hors du commun, il l’inscrit dans une époque qui, comme le prétend une grande chaîne télévisuelle française, vend du « temps de cerveau disponible ». Une époque qui commercialise ce temps sous forme d’unités de forfaits ou le divise en première et deuxième mi-temps (Halbzeit). Dans un email à Heike Föll en 2001, Michel Majerus se dit « convaincu que l’on n’a aucun contrôle sur le peu de temps pendant lequel on peut accomplir de bonnes choses. On ne sait d’ailleurs probablement jamais à quel moment il s’agit de ce temps. Peut-être que cela se passe lorsque personne n’attend quelque chose et lorsque l’on n’a aucune attente envers soi-même. »